Catégorie : Charlotte Maday
Nous vous avions récemment parlé du rapport Colin et Collin. Ce dernier ouvrait les pistes d’une fiscalisation du business des données personnelles. J’avais, sans engager la rédaction de Reflets et par le biais de mon blog pris parti pour cette proposition qui me semblait fortà propos et particulièrement intelligente puisqu’elle a le bon gout de fiscaliser le nerf de la guerre et non des hypothétiques infrastructures qui font l’objet de cyber Gueguerres, par exemple entre Free et Youtube/Google ou encore Orange et Cogent.
Nouvel épisode aujourd’hui après qu’Arnaud de Montebourg ait proposé de contraindre les géant du Net à stocker les données personnelles collectées dans des infrastructures situées sur le territoire national avec la magistrale réponse de Laure de la Raudière sur le site ITEspresso.
Nous expliquions que le business des données personnelles se jouait en 5 étapes :
- La collecte des données ;
- Le traitement des données (processing) ;
- L’utilisation des données (exploitation) ;
- La durée de conservation des données (rétention) ;
- L’éventuelle cession commerciale à des tiers.
Et oui… 5 étapes, 5 leviers fiscaux !
La réponse de la député d’Eure et Loire au ministre du redressement productif aurait pu inclure un nouveau volet dans la droite lignée du rapport Colin et Collin. La député de la Raudière propose de contraindre les éditeurs de services en ligne à stipuler dans quel pays les données personnelles collectées sont stockées. Et bien nous trouvons qu’elle ne va pas assez loin et chez Reflets, nous irions jusqu’à les contraindre à signaler de manière explicite à QUI ils cèdent ces données personnelles.
En France la cession de données personnelles est encadrée par la loi du 6 janvier 1978. Seul problème, la CNIL, l’institution en charge de faire respecter ce cadre légal n’a strictement aucun pouvoir sérieux. Elle ne peut par exemple pas verbaliser un contrevenant pris la main dans le pôt de confiture, ce qui rend son travail bien plus théorique que pratique. Non pas que la CNIL ne travaille pas, ni même qu’elle est incompétente, elle est surtout victime d’un cadre légal un peu léger (un manque de jurisprudences ?) et surtout, d’un manque flagrant de pouvoir.
Dans notre conception d’une application possible des préconnisations du rapport Colin & Collin, nous avons donc 5 leviers fiscaux qui pourraient intervenir en plus des leviers habituels (chiffre d’affaires, bénéfices etc…) : la collecte, le traitement, l’utilisation, la durée de conservation et la cession à des tiers.
Concernant le dernier levier, la cession à des tiers, celui ci est probablement celui que nous aurions l’envie de taxer le plus. Les données personnelles, sont par définition personnelles. Le hic, c’est que les conditions d’utilisation de nombreux services en ligne, notamment américains, font abandonner tout caractère personnel aux données envoyées par les utilisateurs. Et une fois ces données cédées, le droit de retrait devient encore plus compliqué à faire appliquer par les particuliers. Il faut bien comprendre que la cession des données personnelles, c’est la cerise sur le gâteau, et cette cerise, elle peut être particulièrement rentable. Surtout quand on prend en compte le fait que les données cédées, sont déjà rentabilisées par l’entreprise qui les a préalablement collectées et exploitées. Hors, cette cession échappe aujourd’hui à toute fiscalisation.
La tracabilité des données personnelles collectées, au même titre que la traçabilité alimentaire, ce n’est pas une fiction, nous pouvons nous en donner les moyens. Et si des entreprises comme Amesys ou Qosmos ne veulent pas voir leur feuille d’impôt exploser si on taxe la collecte de données personnelles (désolé mais celle ci elle nous fait vraiment rire à la rédaction), et bien qu’elles mettent plutôt en oeuvre leur technologie au service de la traçabilité des données personnelles au lieu de les mettre dans les mains d’un Kadhafi ou d’un Bachar al Assad… et non je n’accepterai pas de poste de directeur commercial chez vous messieurs .
Billets en relation :

Le Ministère de la Culture et de la Communication a annoncé la mise en ligne de la nouvelle version du portail européen des archives.
Ce projet — cofinancé par la Commission européenne — réunit les inventaires d'archives provenant des services d'archives de différents pays européens. Il abrite à ce jour environ 120 000 inventaires de 89 services d’archives répartis dans 16 pays.
L’objectif de ce portail européen est d’alimenter et de soutenir la recherche dans le domaine des sciences humaines, par la mise en commun des inventaires de l’ensemble des services d’archives en Europe. Il permettra ainsi aux chercheurs de dépasser les frontières et d'élargir le champ de leur réflexion.
Deux modes d’accès à ces données sont mis en œuvre dans le projet :
- Une recherche simple, dont les résultats peuvent être affinés à l’aide de filtres par pays, institution, dates, etc., permet à l’internaute d’avoir une vue d’ensemble catégorisée des réponses à sa question.
- Une navigation dans l’arborescence générale permet de partir d’un pays et d’arriver jusqu’à l’inventaire. Cette recherche est destinée en priorité aux chercheurs chevronnés, ou aux archivistes. C’est en effet un moyen de mener des recherches comparatives.
Cette mise en commun des inventaires dans un format homogène ouvre en effet de façon extraordinaire le champ des recherches et offre l’opportunité d’accéder à des archives conservées à l’autre bout de l’Europe ou dont on ne soupçonnait parfois pas l’existence.
Source : Communiqué de presse du 22 février 2013
En savoir plus
Consulter le portail : www.archivesportaleurope.net
Voir nos actualités sur le sujet du 1er avril 2011 et du 27 mars 2012
- Commentaire de Hubert Guillaud :
Le séminaire numérique intergouvernemental prévu pour le 28 février vise-t-il à donner une ligne politique unifiée ? Andréa Fradin fait le tour des politiques numériques des ministères. Mais force est de constater que le numérique n'intéresse pas la politique : le numérique n'est pas au centre des préoccupations des Français, et s'il traverse tous les dossiers, il ne se fixe sur aucun.
Le message traduit ci-dessous, publié ce week-end sur le site de la Maison Blanche, a également été adressé par e-mail aux 65704 signataires de la pétition demandant "un accès libre aux articles de revues scientifiques provenant de recherches financées par les contribuables".
"Augmenter l’accès public aux résultats de la recherche scientifique
Par le Dr. John Holdren
Merci pour votre participation sur la plateforme "We the people". L’administration Obama convient du fait que les citoyens méritent un accès facilité aux résultats de la recherche financée par leurs impôts. Comme vous le savez peut-être, le bureau de la politique scientifique et technologique (Office of Science and Technology Policy, OSTP) se préoccupe de cette question depuis un certain temps, et a eu l’occasion à deux reprises de faire appel au public pour connaître ses suggestions sur les moyens d’arriver à la démocratisation des résultats de la recherche financée par le gouvernement fédéral. Votre pétition a été d’une grande aide dans la discussion sur cette question.
La logique derrière un accès public amélioré est évidente. Nous savons que la recherche scientifique soutenue par le gouvernement fédéral stimule des découvertes scientifiques capitales et des avancées économiques, lorsque les résultats de cette recherche sont accessibles pour les innovateurs. Des politiques qui mobilisent ces biens intellectuels pour une réutilisation via un accès élargi peuvent accélérer les avancées scientifiques, accroître les innovations et encourager la croissance économique. C’est pourquoi l’administration Obama s’est engagée à veiller à ce que les résultats de la recherche scientifique financée par le gouvernement fédéral soient mis à la disposition et au service du public, de l’industrie et de la communauté scientifique.
De plus, ces recherches ont été financées par l’argent du contribuable. Les américains devraient pouvoir accéder facilement aux résultats de la recherche qu’ils aident à financer.
C’est dans cet objectif que j’ai publié aujourd’hui une note à destination des agences fédérales, qui demande à celles qui dépensent plus de 100 millions de dollars en recherche et développement de concevoir des plans d’actions afin de rendre publics les résultats de la recherche financée par des fonds fédéraux, et ce gratuitement, dans un délai de 12 mois après leur publication initiale. Comme vous l’avez indiqué, la politique d’accès public adoptée par les National Institutes of Health (NIH) a été un grand succès. Et, alors que ce nouvel appel politique ne demande pas aux agences de copier exactement la démarche des NIH, il permet de s’assurer que des politiques similaires vont apparaître dans tout le gouvernement.
Comme je l’ai dit, ces politiques ont été développées soigneusement, à travers une vaste consultation publique. Nous voulions trouver un compromis entre l’extraordinaire bénéfice public amené par l’accroissement de l’accès pour tous aux résultats de la recherche financée sur fonds fédéraux et le besoin de garantir que les contributions de grande valeur apportées par l’industrie de l’édition scientifique ne seraient pas perdues. Cette politique reflète cet équilibre, et se donne aussi la souplesse d’y apporter des changements ultérieurs en fonction des usages et des observations. Par exemple, il a été demandé aux agences de travailler sur la base d’une période d’embargo de 12 mois pour leur permettre de développer leurs politiques, mais également d’envisager un mécanisme permettant aux différents acteurs du secteur de leur demander de modifier cette période. Au fur et à mesure de l’avancée des agences dans le développement et l’implémentation de leurs politiques, il y aura de nombreuses possibilités de participation publique pour s’assurer que les agences font le meilleur travail possible pour satisfaire tous les intérêts en présence.
En plus d’aborder la question de l’accès public aux publications scientifiques, cette note demande aux agences de commencer à s’intéresser à la nécessité d’améliorer la gestion et le partage des données scientifiques produites avec des financements fédéraux. Le renforcement de ces politiques va encourager l’entreprenariat et la création d’emploi, en plus de conduire le progrès scientifique. L’accès à des jeux de données pré-existants peut accélérer la croissance, en permettant à des sociétés de concentrer leurs ressources et leurs efforts sur l’interprétation et l’exploitation pleine des découvertes, au lieu de répéter un travail pré-concurrentiel de base, déjà documenté par ailleurs. Par exemple, les données climatiques ouvertes sous-tendent l’industrie de la prévision et fournissent des bénéfices publics importants ; la publication des séquences du génome humain a engendré de nombreuses innovations dans le domaine biomédical – sans parler des nombreuses sociétés générant des milliards de dollars de revenus et les emplois qui vont avec. Progresser vers une plus large disponibilité des données scientifiques va permettre de créer des marchés économiques innovants pour des services liés à la curation, à la conservation, à l’analyse et à la visualisation des données, entre autres.
Alors merci encore pour votre pétition. J’espère que vous conviendrez que l’administration a fait son travail et vraiment répondu à votre demande.
John Holdren est conseiller du Président pour les questions scientifiques et technologiques et directeur du bureau de la politique scientifique et technologique de la Maison Blanche."
Merci à @St_B pour la suggestion de traduction.
[Photo : StevenANichols]
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